La technique

(de) L'AUTRE COTÉ DE LA PEINTURE

Naît à l’antiquité, la peinture sous verre prend son essor à la Renaissance. Elle est alors qualifiée « d’art savant» par la complexité de sa mise en œuvre. Son évolution est intiment liée au foisonnement des arts décoratifs ainsi qu’aux progrès dans la maîtrise du verre. Grâce à l’ajout de matières précieuses comme la feuille d’or ou d’argent et de nouveaux pigments, les compositions n’ont cessé de se sophistiquer. Elles se diffusent alors, des Palazzi italiens, aux demeures aristocratiques du reste de l’Europe. Jusqu’à bord du paquebot Normandie au XXe siècle. Le luxe de ses matières, la délicatesse de son support comme sa réalisation complexe assure à cet art, aujourd’hui encore, une place de choix auprès des décorateurs et ensembliers contemporains.

 

Ce qui fait de la peinture sous verre une technique unique réside en ce que l’œuvre est réalisée à l’envers de son support, au dos du verre. C’est un art de l’anticipation, qui nécessite une conception inversée de la composition. Dans la peinture sur toile, on débute le tableau à grands traits, du fond vers le détail. L’image est construite par un affinage successif et des reprises. En peinture sous verre, on procède à l’inverse, le détail précède le fond. L’image doit être définie avant même son exécution pour que l’artiste puisse la décomposer:

 

 « l’œil de cet oiseau doit être peint avant sa tête. Cet oiseau, lui-même, doit être peint avant l’arbre sur lequel il est posé. Quant à cet arbre, il doit être figuré avant le ciel, qui lui, l’est en dernier. Il en est ainsi de chaque feuille, des antennes d’un papillon, ou des moustaches du fauve », Aucune erreur n’est permise. Il n’y a pas de reprise sur la matière. Il faut effacer pour reprendre. À cette inversion de la profondeur s’ajoute une inversion de la gauche vers la droite. Ce qui est tracé à l’envers du support apparaît inversé sur sa face. C’est un renversement complet du savoir faire et un long apprentissage est nécessaire à la maîtrise de ses subtilités.


C’est aussi dans la matière que réside le mystère de cette peinture : le Verre. C’est un support dur et fragile, brillant et transparent. Tel un vernis, il révèle l’intensité de la couleur et la protège. Comme un miroir, il joue de la lumière. De ses reflets, il donne vie et profondeur au sujet. Mais aussi cassant, il rend l’œuvre plus précieuse encore qui peut disparaître en un instant.